LE SENS CHRÉTIEN DE LA SOUFFRANCE HUMAINE (6)
LECTURE DE LA LETTRE APOSTOLIQUE SALVIFICI DOLORIS (11 février 1984)
DU PAPE JEAN-PAUL II
Le bon Samaritain
« La parabole du bon Samaritain appartient à l'Évangile de la souffrance. Elle indique quelle doit être la relation de chacun d'entre nous avec le prochain en état de souffrance » (n° 28) : non l'indifférence ou la curiosité, mais l'attention et la disponibilité. « Le bon Samaritain, c'est toute personne qui s'arrête auprès de la souffrance d'un autre homme, quelle qu'elle soit » et qui se laisse toucher par cette souffrance. Le bon samaritain fait preuve de compassion. Mais celle-ci, dans la mesure du possible, ne doit pas être seulement une émotion. Elle appelle à agir concrètement en faveur de la personne souffrante. « La révélation par le Christ du sens salvifique de la souffrance ne s'identifie nullement à une attitude de passivité » (n° 30). Au jour du jugement, la sentence dépendra non d'émotions, mais d'actes concrets comme le rappelle Mt 25.
D'une certaine manière, on découvre ici un autre sens de la souffrance : la libération dans l'homme de ses capacités d'aimer. Le monde de la souffrance humaine ne cesse d'appeler le monde de l'amour humain désintéressé. « La souffrance est présente dans le monde pour libérer l'amour, pour faire naître des œuvres d'amour à l'égard du prochain, pour transformer toute la civilisation humaine en “civilisation de l'amour” » (n° 30).
Conclusion
« Le Christ a enseigné à l'homme à faire du bien par la souffrance et à faire du bien à celui qui souffre. Sous ce double aspect, il a révélé le sens profond de la souffrance » (n° 30). Ce sens, s'il est surnaturel, parce qu'enraciné dans le mystère de la Rédemption, est en même temps profondément humain, parce que l'homme s'y reconnaît comme Homme dans sa dignité et sa mission propre. « Manifester l'homme à lui-même et lui découvrir la grandeur de sa vocation », en lui révélant le sens de la souffrance, « est donc particulièrement indispensable » (n° 31).
Post Scriptum
Jean-Paul II à propos de l'attentat du 13 mai 1981 : « J'ai participé à une grande épreuve divine. J'ai dit : épreuve divine. En effet, bien que les événements du 13 mai [...] aient leur dimension pleinement humaine, celle-ci ne peut effacer une dimension encore plus profonde : la dimension de l'épreuve permise par Dieu. [...] Durant les derniers mois, Dieu m'a permis d'expérimenter la souffrance, il m'a permis d'expérimenter le danger de perdre la vie. En même temps, il m'a permis de comprendre clairement et jusqu'au fond que cette souffrance a été une grâce spéciale de sa part pour moi-même et, également à cause du service que j'accomplis comme évêque de Rome et successeur de Pierre, une grâce pour l'Église. Il en est ainsi [...] : je sais que j'ai reçu une grande grâce. [...] Le Christ [...] m'a accordé la grâce de pouvoir, par la souffrance et au péril de ma vie et de ma santé, rendre témoignage à sa vérité et à son amour. C'est précisément cela que je retiens comme ayant été une grâce particulière et c'est pour cela que j'exprime de manière particulière ma reconnaissance à l'Esprit Saint » (Audience générale du 14 octobre 1981, DC 1817, p. 965).
« Je prie pour le frère qui m'a frappé, auquel j'ai sincèrement pardonné. Uni au Christ, prêtre et victime, j'offre mes souffrances pour l'Église et pour le monde » (Audience générale du 21 octobre 1981, DC 1819, p. 1063).